Quelques épisodes de l’histoire sur la plus ancienne conférence des directeurs et directrices de Suisse, depuis sa création jusqu’à la fin des années 60
Cette année, la CDIP fête ses 125 ans. Voici l’occasion de replonger dans l’histoire de la plus ancienne conférence des directeurs et directrices de Suisse, non en présentant la chronologie de la Conférence de façon exhaustive, mais en sélectionnant quelques décisions et événements. Les quatre textes de cette première partie couvrent la période qui s’étend de la création de la Conférence en 1897 jusqu’à la fin des années 60.
L’instruction publique prend forme en Suisse depuis quelques décennies déjà lorsque la CDIP est créée. En effet, si l’histoire de l’école remonte à loin, l’école obligatoire et publique, c’est-à-dire l’école pour toutes et tous, ne fait son apparition, elle, qu’au XIXe siècle. Elle est financée par les impôts et placée sous la surveillance de l’État.
École de village au Tessin vers 1920. Crédit iconographique: Musée national suisse LM-79509.21/Rudolf Zinggeler
Bien que les premiers cantons commencent à inscrire la scolarité obligatoire dans leurs réglementations respectives déjà durant les premières décennies du XIXe siècle, le chemin est encore long. Nombreuses sont les familles et les communes qui s’opposent à l’obligation de scolariser les enfants, notamment parce que nombre d’entre eux travaillent dans les champs ou les usines. En 1874, la Constitution fédérale fixe elle aussi à l’art. 27 le caractère obligatoire de l’école. C’est en 1897 que les chefs des départements cantonaux de l’instruction publique se réunissent à Lucerne pour leur toute première séance et se penchent sur la question du subventionnement de l’instruction primaire par la Confédération.
«Les chefs de l’ensemble des départements cantonaux de l’instruction publique se réunissent au moins une fois par an afin de traiter des questions communes portant sur l’école et l’instruction des jeunes, et dans le but d’établir un contact mutuel.»
C’est ce que prévoyait la première disposition du règlement adopté par la CDIP en 1899, qui a régi le fonctionnement de la Conférence jusque dans les années 1960. Cette disposition reflète parfaitement la vision que défend la CDIP: celle-ci se veut un instrument d’échange et de compréhension réciproque, qui ouvre la discussion sur les questions relatives à la politique de l’éducation. Les 70 premières années de l’histoire de la CDIP sont ainsi surtout marquées par les sujets traités par la Conférence. La liste des points à l’ordre du jour en image, qui date de 1901, illustre très bien la diversité des thèmes abordés.
Circulaire pour la séance du 27 août 1901 avec les points à l'ordre du jour
On peut ainsi citer parmi les thèmes récurrents de ses séances l’atlas scolaire suisse, la publication de l’Annuaire de l’instruction publique en Suisse, l’écriture enseignée aux élèves suisses, l’orthographe, l’enseignement des règles de la circulation à l’école, la décoration des salles de classe, les cours d’école ménagère, le cinéma et les films à l’école, la maturité gymnasiale et de nombreuses questions sur les moyens d’enseignement.
«Ces produits étrangers ne sauraient convenir tout à fait à nos écoles puisqu’ils ne tiennent pas suffisamment compte de la représentation de la Suisse et que, à l’inverse, ils traitent trop en détail les autres pays comme l’Allemagne.»
Dans une lettre adressée aux chefs des départements cantonaux de l’instruction publique en 1898, le canton de Zurich explique pourquoi, selon lui, les atlas réalisés par d’autres pays ne sont pas adaptés aux écoles suisses. La même année, les directeurs cantonaux prennent la décision de commander l’élaboration d’un atlas scolaire suisse, qu’ils publieront conjointement. La décision finale est prise en 1900.
La première édition allemande paraît en 1910, suivie en 1912 et en 1915 des versions française puis italienne. Depuis, des générations entières d’élèves ont utilisé l’Atlas mondial suisse. L’ouvrage devient le manuel scolaire de référence pour l’enseignement de la géographie aux degrés secondaires I et II. La dernière édition imprimée date de 2017. Un «monde virtuel» vient aujourd’hui compléter cette édition imprimée en proposant des ressources complémentaires et divers outils interactifs. Vers le site de l'Atlas mondial suisse
«Dans un État fédéral comme celui de la Suisse, il semble étrange que les cantons fassent obstacle au corps enseignant.»
Lors de la séance de la CDIP qui s’est tenue le 23 octobre 1926 à Genève, le conseiller d’État Johann Jakob Tanner (AR) fait partie de ceux qui expriment leur incompréhension quant à l’absence de libre circulation entre les cantons dans la profession enseignante. Souvent, les personnes qui prétendent à un poste d’enseignant ou d’enseignante dans un autre canton doivent même repasser l’examen pour être admises.
École à Kien vers 1942 / Crédit iconographique: Burgerbibliothek Bern, N Eugen Thierstein 343/8
La libre circulation du corps enseignant a fait l’objet de nombreuses discussions au sein de la Conférence, notamment en 1926. À cette époque, la question est brûlante: dans certains cantons, on enregistre un excédent d’enseignants, parfois préoccupant, comme le rapporte le procès-verbal de la séance du 23 octobre 1926. Comme lors des précédentes discussions, les obstacles, c’est-à-dire les différences d’ordre confessionnel, linguistique et politique entre les enseignants se révèlent finalement trop importants pour convenir d’une pratique uniforme dans tout le pays. Les cantons continuent donc de miser sur des accords individuels à l’échelle bilatérale.
«Notre service est confronté chaque jour à des problèmes auxquels d’autres cantons ont dû faire face avant nous, et nous aimerions bien savoir comment ils ont su les résoudre»,
faisait remarquer le conseiller d’État Fritz Stucki (GL) lors de la cérémonie d’inauguration du Centre d’information en matière d’enseignement et d’éducation (CESDOC), qui a eu lieu en 1962 à Genève. Fondé en collaboration avec la Confédération, ce service d’information est la première institution de la CDIP. Sa mise sur pied montre bien l’importance majeure que revêtent déjà à cette période l’échange de connaissances sur les questions scolaires et la collecte d’informations concernant le système scolaire suisse. Depuis 1994, ce service est géré par la CDIP et rattaché à son Secrétariat général sous le nom de Centre d’information et de documentation IDES.
La fondation d'autres institutions suit. Aujourd’hui, la CDIP est responsable de cinq institutions, dont deux conjointement avec la Confédération.
Série d’article «La CDIP fête ses 125 ans»
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