Auteur: Bernard Wicht, responsable de l'unité Affaires internationales
Bernard Wicht explique pourquoi, ces dernières années, les pays européens s’intéressent toujours plus au secondaire II suisse.
Le secondaire II suisse est un véritable Sonderfall en Europe. Presque aucun autre pays ne compte autant de filières différentes à ce niveau d’enseignement. Depuis quelques années, nos voisins européens s’intéressent beaucoup au système suisse. Pourquoi? C’est ce que nous explique Bernard Wicht.
Le secondaire II suisse: un Sonderfall en Europe
Dans la plupart des pays d’Europe occidentale (hormis D et A), le secondaire II est une filière relativement étroite débouchant sur le baccalauréat et l’entrée à l’université. Autrement dit et pour le dire de manière un peu schématique, c’est en quelque sorte une «passerelle» entre l’école obligatoire et les études supérieures. En Europe ainsi, priorité est donnée à la formation académique avec comme objectif 80 % de diplômés du tertiaire. La Suisse en revanche se situe quasiment à l’inverse du schéma européen, le secondaire II est relativement complexe avec différentes filières que ce soit dans la formation générale (gymnase, école de culture générale, etc.) ou la formation professionnelle (choisie par plus de 70 % d’une classe d’âge). À ces différentes filières correspondent évidemment plusieurs types de diplômes permettant soit d’entrer directement sur le marché du travail (Certificat de fin d’apprentissage p. ex.), soit d’accéder aux études universitaires. Du point de vue politique, cantons et Confédération accordent une importance prioritaire au secondaire II et se sont fixé, comme objectif stratégique national, de parvenir à 95 % de diplômés du post-obligatoire. En d’autres termes, dans ce domaine, la Suisse affirme solidement son Sonderfall.
Un système qui fascine nos voisins européens
Dans ces conditions, il faut donc se demander pourquoi, depuis quelques années, nos voisins européens s’intéressent tant au secondaire II suisse. Nous accueillons en effet régulièrement des délégations étrangères venant s’informer sur le fonctionnement de celui-ci. De son côté, l’OCDE nous a demandé de coacher son nouveau projet en la matière Above and Beyond: Transition in Upper Secondary Education. Et lors des réunions du Conseil de l’Europe, nous sommes souvent sollicités, en marge des séances, pour donner des explications sur le pourquoi et le comment de l’importance de la formation professionnelle duale. La raison de cet intérêt, qui ne se dément pas, est double: en Europe, le décrochage scolaire au niveau du post-obligatoire dépasse les 20 % et il en va de même du chômage chez les 20-28 ans. Ceci signifie que, pour les jeunes gens et jeunes filles qui ne parviennent pas à décrocher un baccalauréat, il n’y a pas d’autres voies de formation disponibles et que, hormis les «petits boulots», c’est le chômage de longue durée qui se profile à l’horizon!
Diversifier le secondaire II, investir dans l’avenir
En mettant ainsi l’accent sur le secondaire II, la Suisse veut éviter le développement d’une telle situation chez les jeunes générations. C’est pourquoi à la diversité des filières mentionnée plus haut vient s’ajouter la volonté d’un post-obligatoire perméable et flexible permettant de passer du «général» au «professionnel» ou de changer de filière d’apprentissage. Évidemment, ceci a un prix: le rallongement de la durée de la formation – il arrive relativement fréquemment que les jeunes terminent vers 21–22 ans là où leurs homologues européens terminent vers 17–18 ans. Mais l’essentiel est de ne laisser personne sur le bas-côté de la route!